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Jeannine tient les maquettes de Jeannot

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Irina Favero-Longo

Commissaire : Arthur Cordier

184159 En Féronstrée

La vidéo Jeannine tient les maquettes de Jeannot a été filmée chez Jeannine, ma grand-mère. À Paris, au 160 avenue du Maine, au deuxième étage, dans son appartement.

Au fond à droite : la chambre. Dans la chambre : le lit. Derrière le lit : une pièce remplie de cartons. Dans ces cartons : les maquettes que fabriquait Jeannot, le mari de Jeannine. Seul certaines personnes ont le privilège de pénétrer ce lieu, cette enveloppe qui entoure Jeannine. Jeannine, assise sur le lit, me raconte sa vie. Elle fait dos à cette pièce qui renferme d’innombrables boîtes dans lesquelles sont rangés ses souvenirs. Elle est face à moi, à la fenêtre fermée, et à sa télévision.

Sa position lorsqu’elle me parle fait le lien entre deux espaces : l’espace intérieur intime, quelle garde derrière elle ; et l’espace extérieur qui se trouve devant elle : la fenêtre, et moi qui l’écoute. Mon oreille puis ma caméra sont les véhicules de ce passage d’un espace clos à un espace ouvert. Je l’imagine dans son récit être connectée à ses cartons derrière elle et en être la gardienne.

L’intérieur de Jeannine est l’histoire de multiples enveloppes. L’enveloppe des murs de l’appartement comme refuge, l’enveloppe des cartons qui entourent les objets de son passé, puis ses mains qui enveloppent ces objets. Cette notion d’enveloppe est liée à ma pratique de l’image : le cadre est une enveloppe qui détermine, définit mais reste poreuse de son environnement externe. La porosité entre le cadre et le hors cadre est pour moi symbolique des débordements de l’environnement et de l’architecture sur nos corps.

Cette vidéo est partie de mon désir de faire tenir les maquettes de Jeannot dans les mains de Jeannine. Ces maquettes qu’elle porte deviendront alors le décor de son récit que nous construisons ensemble, entre souvenirs et fantasmes. Jeannine fluctue entre « être dans l’espace » et « être l’espace ». Elle se fond dans les murs, puis revient comme sujet.

La maquette déclenche la parole de Jeannine. Elle est empreinte d’affect, d’une histoire intime et domestique. L’installation de Jeannine tient les maquettes de Jeannot à Art au Centre s’intéresse à ce passage entre la maquette et la vidéo, entre l’objet et sa prise en main. Il s’agit d’une femme qui prend en main le décor et habite l’image.

 

Irina Favero-Longo